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Gueules de Bourguignons – épisode #1 avec Amalia Perier ☄️ @marguerite_et_jorge 🐭 

« Toute petite déjà, je disais à ma mère que je voulais monter une marque de poupées. Très logiquement, j’ai poursuivi des études à Paris, dans la mode. Et j’ai eu la chance de travailler pour de belles maisons, de grandes marques. De créer par exemple les poupées Sonia Rykiel des vitrines de Noël 2015 du Printemps. Une très belle expérience, mais ô combien difficile. Les cheveux, les détails, les accessoires, tout relevait d’un sacerdoce. Malgré les signatures prestigieuses, les références mondiales, je ne me retrouvais pas dans le milieu du prêt-à-porter. Un jour, j’ai pris l’ascenseur de la grande maison pour laquelle je travaillais, et j’ai décidé que c’était la dernière fois. La dernière fois que je mettais les pieds dans cet ascenseur, dans cet endroit. La dernière fois que je faisais le choix d’un investissement personnel énorme, sans création à la clé. Sans vie à la clé. Car là étaient les deux clés : la vie, et la création. J’en avais presque acquis un dégoût du vêtement. Il était temps de tout arrêter, de tout changer. Et puis il fallait que je trouve une solution pour déménager à Dijon, pour vivre à Dijon, là où mon conjoint allait poursuivre son aventure professionnelle. Cette période coïncidait avec le premier confinement. J’ai donc décidé de sauter le pas, et de tenter l’aventure. Il faut dire que quelques mois plus tôt, pour passer le temps, un week-end, j’avais créé ma première poupée souris. Pourquoi la souris ? Peut-être parce qu’elle n’avait pas de cheveux, et pas d’accessoires ! Toujours est-il que le modèle est né par hasard, dans mes mains. Je suis une fan d’Ernest et Célestine… qui sait si l’inconscient a parlé ? Une chose est sûre, j’ai fait une étude de marché bien après ce prototype, pour me rendre compte que le « marché de la souris » était finalement peu occupé.

Au début du confinement, j’ai commencé à décliner le couple Marguerite et Jorge – le nom de mes grands-parents, devenu mon nom de marque. Je gardais dans un premier temps ce prisme du prêt-à-porter, inspirée par la haute couture : je souhaitais créer des couples de grandes poupées, que les clients pourraient habiller, looker, relooker au fil des saisons. Je visais clairement une clientèle parisienne… pour vite me rendre compte que ma cible n’existait peut-être pas en tant que telle, ou en tout cas n’était pas assez large. Ca ne prenait pas, pour différentes raisons, et notamment le positionnement prix, couplé au fait que je travaillais tout juste ma notoriété. J’ai vite compris qu’il fallait faire pivoter la proposition de ma marque. Quand on ne fait pas de vente, il faut s’interroger vite, très vite, c’était ma conviction. Je sentais que ce n’était pas une question de temps, mais de positionnement. J’ai alors travaillé à un autre prototype : les Popeline, à savoir toujours la souris, mais plus en couple, la souris individuelle, et surtout en modèle unique, avec des tissus choisis, chinés, en petite quantité. Popeline, là encore, pour ne rien oublier de là où je viens, le travail du tailleur, de ce tissu qu’est la popeline. Et il se trouve que les premiers prototypes étaient en popeline de chemise, en l’occurrence celles de mon beau-père ! C’est le tissu qui est devenu le nom de ce modèle unique de poupée, et que j’ai fini par déposer. J’en ai d’abord fait 10, prudemment, toujours pendant le confinement. A peine mises sur mon site, les commandes ont afflué ; j’étais sold out en 2 jours. Je me suis dit que je tenais peut-être quelque chose. Pour l’anniversaire de mon mec, je crée alors une grande poupée Jorge « métier », que j’habille en robe d’avocat et que je partage sur Instagram en clin d’œil ; je reçois 10 commandes dans la soirée.

Je me suis donc décidée à décliner les professions, les thèmes : docteurs –  il paraît qu’elles rassurent les enfants dans les cabinets médicaux !- , un hockeyeur, un couple de mariés… Je m’amuse beaucoup sur cette gamme, que je propose désormais sur-mesure, et dont les clients comprennent mieux le tarif, du fait que mon travail est, aussi, davantage connu. Le prix est donc mieux compris ; c’est de la haute-couture, du sur-mesure.

Je ne fais que des modèles uniques, en Popeline comme pour les commandes sur-mesure ; j’achète des tissus au coup de cœur, rarement au rouleau ; je veille à sourcer précisément les matières premières. J’ai aussi beaucoup travaillé sur les normes européennes, sur les normes liées à l’enfant. Avec les Popeline, sont rapidement arrivés les demandes de revendeurs. Un premier à Dijon, un second à Paris, dans le 16ème arrondissement, Strasbourg, et aujourd’hui New York, le Canada… ça fait son petit chemin. J’ai créé plus de 800 Popeline en un an. J’ai parfois du mal à réaliser. Et je sais qu’il faut structurer. J’ai dû, par exemple, prendre la décision de déléguer à une couturière une partie de la fabrication. Je continue à couper, à veiller ; cela me permet de garder par ailleurs la main sur la communication, le digital, le fil directeur de l’entreprise, de son identité. Aujourd’hui, je sais qu’il va me falloir franchir un nouveau cap. Je participe à des salons, à des festivals…. Cela permet aussi de rencontrer d’autres créateurs, de m’apercevoir qu’on partage les mêmes difficultés, les mêmes questionnements. C’est essentiel. Je travaille donc activement sur la suite, j’essaie d’anticiper Noël… je pense que cette fin d’année va être folle ! J’espère bientôt développer mon propre atelier, et 1001 idées créatives dans un lieu dédié… qui sera, je l’espère, placé sous le signe du partage, de l’ouverture….et bien sûr, en Bourgogne ! »